Immense et rouge 2012 Akin Cetin et Marie Chartres
Présentation de l’éditeur :
La fleuriste est la meilleure, la plus douée,
a déclaré la voisine.
La commerçante a expliqué ces fleurs-là,
ces fleurs-là meurent jolies.
Vous pensez bien, je sais les choisir.
De toutes les mortes, ce sont vraiment les plus jolies.
Voilà Immense et rouge. Sombres et poétiques, les mots de Marie Chartres s’y enroulent autour des photographies d’Akin Çetin pour un détour en apnée au pays du trauma.
Ce livre-là, impossible de me rappeler comment il est arrivé en haut de ma pile de bouquins. Le néant. Quelqu’un l’a-t-il oublié chez moi ? Me l’a-t-on offert ou prêté ? Ou bien l’ai-je commandé compulsivement en même temps que d’autres ouvrages ? Le mystère reste entier. Mais quel que soit l’événement qui a conduit se livre à ma table de chevet, je ne le regrette en rien !
Tout d’abord, parce que c’est un bel objet. L’idée d’associer les photos d’Akin Çetin et les textes poétiques de Marie Chartres apporte vraiment quelque chose à l’appropriation de l’oeuvre. En fonction de l’endroit où les images sont situées, elles sont influencées par notre compréhension de la poésie, mais peuvent également changer notre regard, notre perception des poèmes. Si l’on pouvait craindre que l’association soit superficielle, le défi est relevé avec brio : c’est comme s’il n’y avait qu’un seul et même auteur.
Ce qui m’a surprise dans ce recueil, c’est l’histoire. Car lorsqu’on lit de la poésie, on s’attend rarement à avoir une trame narrative comme c’est le cas ici. Mais encore une fois, les mots ne sont ni poussés, ni artificiels.
Quant au contenu des poèmes, on y trouve des thématiques bien sombres, allant du désamour à la folie, toujours traitées de manière anti-spectaculaire, comme si l’on s’enfonçait doucement dans l’univers de cette femme que nous suivons pas à pas, dans le mal qui la ronge. Les mots sont précis, concrets, riches, douloureux souvent.
Evidemment, malgré le côté narratif, cela reste de la poésie, avec sa part de mystère, des passages qui nous échappent. Il faut donc savoir, à certains moments, lâcher prise et se laisser bercer par les mots.
Extrait :
« Valse lente au fond du lavabo, va-et-vient des vagues de dissolvant, tee-shirt coton et synthétique, toutes les semaines noyé dans l’eau, se fondant fibre par fibre dans l’aquatique, relique entre des mains de plus en plus vieillies. C’est une si douce chose d’avoir son passé de coton entre les doigts. Le submerger, le frictionner, le frapper contre l’émail blanc. Une asphyxie entre deux pouces.
Dans ce monde de boue, de viscères et de baisers.
Continuer de laver.
Un vêtement, au bout de dix années. »